mercredi 1 décembre 2010

Chapitre A - G. - 2

2ème partie : Les trois grandes aires de puissance dans le monde
Géographie
L'Amérique du Nord
Chapitre A :                          Les Etats Unis, l'hyperpuissance.
Les Etats Unis sont-ils encore la puissance hégémonique et sans rival que l'on connait ? 
        1- La maîtrise du "Hardpower"
               a- La première puissance productive du monde

        La part des USA dans la production de richesses représente presque 30% du PIB mondial pour moins de 5% de la population.
       - Les USA ont développé la première agriculture du monde. Ils occupent la 1ère place pour le maïs et le soja, la 2ème pour les agrumes et le coton … Fortement exportatrice, elle représente un véritable moyen de pression : le "food power". L'agriculture est intégrée à un très puissant complexe agro-industriel (agribusinesse) qui diffuse ses productions partout.
       - L'industrie est toute aussi puissante. Certains secteurs traditionnels, comme le textile, la sidérurgie, les chantiers navals sont en déclin.
Cependant elle garde des positions solides, dans l'automobile (General Motors) et la chimie (1er rang mondial). Et plus encore dans les industries de haute technologie, l'aéronautique, les bioécologies, les nantis technologies et les NTIC (nouvelles technologies de l'information et la communication). 
       - Le sectaire tertiaire constitue toutefois le principal atout du pays. Parmi eux, les services "d'intégration" tournés vers les entreprises (services financiers, recherche, développement, commerce … ) sont les véritables locomotives de la croissance. Ils illustrent donc l'intégration des USA à l'économie informationnelle. 

        b- La première puissance commerciale et financière

        - Les USA sont en toute logique le premier pays commerçant du monde. C'est le résultat d'une politique d'ouverture commerciale depuis Bretton Woods. Les produits manufacturés constituent l'essentiel des échanges. Gros consommateur d'énergie, le pays est contraint d'acheter de grosses quantités d'hydrocarbures. Le déficit commercial est gigantesque mais indispensable à la croissance mondiale. Il est par ailleurs en partie compensé grâce à la balance des services et des capitaux excédentaires. 
       - Les USA dominent aussi la sphère financière. Il représentent presque 50% de la capitalisation boursière mondiale. Celle-ci se concentre essentiellement à New York (NYSE = Wall Street) qui reste toujours la première place boursière mondiale. Elle est renforcée par le NASDAQ (indice particulier pour les nouvelles technologies). Les bourses de commerce (board of trade) de Chigago et de New York fixent les cours mondiaux des matières premières. La puissance américaine s'appuie aussi sur le dollar, monnaie de référence par excellence. Il est en effet la principale monnaie de réserve, de change, mais aussi de règlement en particulier pour les hydrocarbures. 
Les USA sont au coeur des flux de capitaux. Ils sont à l'origine du 1/4 des IDE et restent par ailleurs le principal pôle d'accueil des IDE notamment d'Europe et d'Asie de l'Est. Le marché américain reste donc très attractif. 
        - La polarisation des flux commerciaux et financiers colossaux permet aux USA de constituer des aires d'influence à l'échelle régionale et mondiale. Le 1er cercle est celui de l'ALENA qui constitue une zone de libre échange de plus de 440 millions d'habitants. L'ALENA doit théoriquement préfigurer une ZLEA (zone de libre échange des Amérique) un grand marché allant de l'Alaska à la terre de feu. La puissance américaine s'exerce donc prioritairement à l'échelle du continent américain. 
L'Europe reste néanmoins la région la plus importante pour le commerce et plus encore pour les échanges de capitaux. Les échanges avec l'Asie Orientale sont en plein essor. Les autres régions correspondent à une présence ponctuelle souvent plus militaire qu'économique (Moyen-Orient, Asie Centrale …)

        c- La première puissance militaire et diplomatique

       Depuis l'éclatement de l'URSS en 1991, les USA apparaissent comme l'hyper-puissance stratégique. L'effort de défense représente 45% des dépenses militaires mondiales. Ils détiennent ainsi le plus formidable appareil militaire jamais créé. Celui-ci s'appuie sur le complexe militaro-industriel sans équivalent fondé sur de puissantes firmes d'armement. 
        Leurs forces navales et aériennes leur donnent une capacité de projection mondiale. L'armée américaine est déployée sur l'ensemble du globe grâce à ses bases militaires notamment en Europe, au Moyen-Orient et en Asie Centrale. Les flottes de l'US Army sillonnent les océans du monde, la 6ème en Méditerranée, la 7ème en Asie Orientale. Les USA mènent de front une guerre en Irak et une en Afghanistan.
        Ils entendent se rendre invulnérables par la mise en place d'un bouclier anti-missile. Ils procèdent à une surveillants par satellite et à la surveille du monde grâce à un système Echelon. En diplomatie, ils  utilisent leur position à l'ONU et leur place au coeur des grandes alliance : OTAN, OTASE, ANZUS … pour promouvoir leurs choix stratégiques.


2- La maîtrise du "soft power"
a- Le prestige des valeurs politiques et du modèle idéologique

        Le prestige des USA s'appuie également sur la capacité de séduction de son modèle : le soft power. 
Le domaine politique, qui est fondé sur le goût de la liberté, le fédéralisme et la démocratie libérale. 
Le modèle économique met en valeur l'idée de réussite personnelle, le self made man. Il est nourri par la pensée capitaliste et libérale. Le vieux fond protestant explique le rapport déculpabilisé à l'argent. Aux yeux de nombreux américains, ces valeurs ont vocation à être étendues au monde entier. Il s'agit de la "destinée manifeste" (manifest destiny) que Dieu aurait confié à l'Amérique. De fait, un certain nombre de nations se réclament du modèle américain (Pologne, Géorgie …) Les USA parviennent encore à projeter une image forte d'eux-mêmes. Leur influence à l'OMC, au FMI, au G20, dans l'ALENA est déterminante. Ils ont largement contribué à distribuer les valeurs libérales du modèle reaganien : désengagement systématique de l'état, déréglementation des services (notamment financiers), et libre échange généralisé.


b- Le pôle majeur de la recherche et de l'innovation

La séduction (softpower) dépend aussi de la capacité à conduire le processus d'innovation. Celui-ci est essentiellement le fait d'universités prestigieuses et de centres de recherche.  MIT, Harvard, Yale, Princeton, Berkeley, Stanford sont de véritables pépinières de prix Nobel. Elles attirent les chercheurs du monde entier en leur offrant des salaires élevés et les moyens de leur recherche. 
Les dépenses de recherche et de développement sont les plus importantes du monde. Les 3/4 sont réalisés par des entreprises privées mais d'importants financements publics sont injectés dans le complexe militaro-industriel. 
Cet effort explique la forte croissance jusqu'en 2008, l'économie américaine est ainsi parvenue à maintenir son avance, notamment dans les NTIC. Internet, développé à l'origine par l'armée américaine est ainsi encore dominé par les firmes et les technologies américaines. Plus récemment, les start up ont investi les secteurs d'avenir : les biotechnologies, les énergies propres, les nanotechnologies.

c- L'universalité de la culture

L'extraordinaire rayonnement des USA est surtout le fait d'une culture de masse, liée à "l'entertainment". Elle est produite par les Majors du cinéma, de la télévision et de la musique mais aussi les FTN comme Mc Donald, Coca cola, Nike … Elles diffusent ainsi des loisirs stéréotypés, des modes alimentaires et vestimentaires et surtout des valeurs qui tendent à être adoptées partout. Ce phénomène est porté par l'hégémonie de l'anglo-américain comme langue des échanges internationaux. Elle est servie par la maîtrise des réseaux mondiaux d'information (CNN …) et de communication. Aussi, certains craignent une uniformisation culturelle du monde, sur la base de la "sous-culture" américaine. 
- Le rayonnement des élites culturelles et artistiques est également remarquable. Elles élaborent l'essentiel des nouvelles tendances artistiques, des modes de pensée et des tendances idéologiques dominantes : le souci du à la différence, du multiculturalisme, le politiquement correct (political correctness) sont largement importés d'Amérique du Nord. Aussi les USA continuent-ils à fasciner le monde. Leur force d'attractivité fait d'eux le 1er pôle migratoire de la planète. On compte autour de 700000 entrées légales venues pour l'essentiel d'Amérique latine et d'Asie orientale. Il s'y ajoute une très importante immigration clandestine.

3- Les limites de l'hyperpuissance
a- Le poids des déficits

La capacité des USA à conduire la mondialisation connait de sérieuses limites. L'UE, le Japon, la Chine et d'autres puissances émergentes seraient des concurrentes redoutables. En Amérique latine même, le MERCOSUR manifeste des réticences vis-à-vis de Washington. Le projet de ZLEA a même été rejeté en 2005. 
Surtout les USA se sont accommodés de déficits énergétiques, commerciaux et financiers abyssaux. Compte tenu de la confiance qu'ils inspirent, leur endettement a jusqu'à présent été financé par le reste du monde. Le Japon et la Chine ont ainsi acheté massivement des bons du Trésor américain. Mais il semble que l'on soit parvenu au bout de cette logique. Par ailleurs, le laisser aller et les déréglementations du secteur financier ont donné lieu à une intente spéculation immobilière. Des produits financiers douteux ont été élaborés et se sont répandus partout dans le monde. L'éclatement de la bulle des subprimes débouche alors sur une véritable crise de confiance. Elle provoque à l'automne 2008 une débâcle financière mondiale jamais vue depuis 1929. Le retour aux réalités s'avère douloureux pour une Amérique désormais en récession. Quelles que soient les suites, on peut supposer que les USA ont cessé d'être l'hyperpuissance économique dominante. 

b- Le poids de la surexpansion impériale 

Les interventions militaires et la diffusion du modèle culturel américain provoquent des effets de rejet parfois extrêmes. Ainsi, les attentats du 11 septembre témoignent de la profonde hostilité d'une grande partie du monde musulman. L'enlisement militaire en Irak et plus encore en Afghanistan n'a fait que renforcer les tensions. Aux yeux de la majorité du monde le modèle américain est gravement terni notamment par l'usage de la torture à Guantanamo, Abou Ghraïb … Aux USA même, l'opinion publique se montre de plus en plus opposée à la guerre. 
Les puissances émergentes s'en laissent de moins en moins conter. Ainsi, en août 2008, la Russie n'hésite pas à envahir la Géorgie, allié pourtant très proche des USA. En Amérique latine, les protestations se cristallisent autour du Venezuela d'Hugo Chavez. La contestation de l'unilatéralisme américain gagne même les pays traditionnellement proches des USA comme l'Allemagne ou la France. L'opinion européenne leur reproche leur peu d'intérêt pour le sort de l'environnemental de la planète (rejet du protocole de Kyoto). Sur le plan mondial, les USA ne sont plus en mesure de maintenir une position hégémonique. 

c- Le poids des fractures intérieures

Sur le territoire américain lui-même, les signes de fragilité sont nombreux. L'ensemble des services publics a souvent été sacrifié sur la base des politiques de restriction budgétaire menées depuis l'ère Reagan. Sous-financés, déprofessionalisés, et démoralisés ils se montrent parfois d'une surprenante inefficacité. C'est ce qu'illustre en particulier les conséquences de l'ouragan Katrina à la Nouvelle Orléans en 2004. 
La société américaine est traversée de multiples fractures. Environ 40 millions d'américaines se trouvent en dessous du seuil de pauvreté. Les contrastes s'exacerbent entre les régions bénéficiant des retombées positives de la mondialisation (façades maritimes …) et les régions sinistrées par la liquidation de pans entiers de l'industrie américaine (Rustbelt …)
A plus grande échelle, les quartiers péricentraux pauvres, isolés du marché de l'emploi s'enfoncent dans la pauvreté. Les classes moyennes se retirent dans des périphéries aisées. La montée de la violence conduit même à l'apparition de "gated communities" (lotissements fermés). A cela s'ajoutent les effets du communautarisme. Il débouche sur l'homogénéité ethnique des quartiers (ghettos noirs, barrios latinos …) et des tensions qui fragilisent la cohésion de la nation. 

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