2ème partie : Les trois grandes aires de puissance dans le monde
Géographie
L'ASIE ORIENTALE
Chapitre A : Une aire de puissance en expansion
Comment un espace aussi diversité que l'Asie Orientale est parvenu à s'imposer comme une aire de puissance majeure ?
1- L'Asie Orientale : un centre d'impulsion majeur
a- Le premier foyer de peuplement mondial
La façade orientale de l'Asie apparait comme un espace éclaté en zone littorale, archipel et presqu'île ouvert sur l'Océan Pacifique et ses mers bordières. Il est constitué des provinces maritimes de la Chine, de la Corée du Sud, de l'archipel du Japon, de Taiwan et de Singapour. Elles forment le principal foyer de peuplement de la terre. Elles regroupent en 2010 environ 880 millions d'habitants soit 12% de la population mondiale. Ils se concentres dans une cinquantaine d'agglomérations millionnaires parmi lesquelles quelques mégapoles tentaculaires comme Tokyo, Séoul, ou Shangaï. Toutefois on observe également de fortes densités rurales dans les , les plaines . Elles sont liées à la riziculture irriguée qui nécessite une force de travail importante mais permet de nourrir les populations nombreuses.
L'Asie Orientale trouve aussi son unité dans une identité largement forgée par la civilisation chinoise. Au delà de la Chine littorale, de Taiwan, et de Singapour qui sont des peuplements chinois, celle-ci a en effet profondément marqué la Corée et le Japon. Elle est à l'origine de valeurs sociales et culturelles communes inspirées notamment par le confucianisme : sens de la communauté et du groupe, respect de l'autorité et de la hiérarchie, goût du travail et de l'étude.
b- Une aire de croissance spectaculaire
Malgré ces élément culturels communs, l'Asie Orientale présente une grande diversité qui rend apparemment difficile une analyse globale.
Dans le domaine politique tout semble opposer la RPC communiste aux démocraties libérales que sont le Japon et plus récemment la Corée du Sud et Taiwan.
Les disparités de niveau de vie et d'activités économiques sont fortes. Le Japon et Singapour disposent d'un PIB par habitant parmi les plus élevé au monde. La Corée du Sud et Taiwan sont désormais des PDEM. La Chine littorale apparait encore comme un espace en développement, certes rapide.
Toutefois, l'Asie Orientale trouve son élément d'unité principal dans son dynamisme qui la distingue dans la sphère mondiale. Elle est devenue une aire de puissance comparable aux deux autres pôles de la Triade. Elle représente plus d'un quart du revenu mondial.
Sa puissance est essentiellement industrielle. Elle s'accompagne d'un rayonnement commercial considérable. Elle réalise en effet presque 1/3 des exportations mondiales de marchandises et dégage des excédents considérables avec tous ses partenaires.
Les produits d'électronique et d'automobile japonaise, le textile et les objets manufacturés chinois (les jouets, machines à laver, composants électroniques) submergent les marchés américains et européens.
Un tel dynamisme et de nombreux avantages comparatifs attirent des flux massifs de capitaux et d'unités de production délocalisés notamment vers la Chine.
Toutefois, le Japon est lui-même un des tous premiers investisseurs mondiaux (exemple de Toyota à Valenciennes). La Chine est en train de suivre la même voie.
Les marchés boursiers de Tokyo, Singapour, et Hong-Kong figurent parmi les places financières les plus actives de la planète.
c- Une gigantesque zone de développement industrialo-portuaire
L'essor de l'Asie Orientale se traduit spécialement par le développement de zones maritimes interdépendantes et ouvertes sur le monde. Les villes portuaires sont en effet les principales bénéficiaires de l'essor des échanges. Ainsi, 17 des 20 principaux ports de commerce du monde sont désormais situés en Asie Orientale. La baie de Tokyo (Tokyo, Yokohama, Chiba), le Kançaï (Osaka, Kobe), Singapour et Hong-Kong sont les éléments traditionnels d'une gigantesque façade littorale. A cela s'ajoute le delta de la rivière des Perles (Canton, Shenghen) et le complexe Shanghaï-Pudong ur le littoral chinois. L'Asie Orientale représente désormais 50% du trafic mondial de conteneurs.
La littoralisation de l'économie participe pleinement à la logique de la mondialisation. Des zones franches industrielles d'exportation sont localisées près des ports. Des zones industrialo-portuaires accueillent des industries lourdes. Par exemple les chantiers navals qui assurent environ 80% de la production de bateaux notamment en Corée.
2- Une aire de développement en relais
a- Le Japon centre d'impulsion du développement
L'affirmation de l'Asie Orientale est le produit de l'essor successif de plusieurs pays, plus ou moins à partir du modèle japonais. Après la seconde guerre mondiale, le Japon a développé ses industries et s'est intégré au marché mondial en s'appuyant sur l'industrialisation la plus ancienne d'Asie (Meiji - 1868) et sur une stratégie de développement : le "vol des oies sauvages":
- il s'est d'abord contenté de productions industrielles basiques (textile …) et a cherché à conquérir son marché intérieur. Par la site il a accru ses exportations dans les pays voisins. Il a ensuite délocalisé pour conquérir de nouveaux marchés tout en se lançant dans des productions à plus forte valeur ajoutée (automobile, électroménager …) Il a opéré ainsi une remontée des filières continue.
Au début du 21ème siècle, le Japon envient ainsi un pôle majeur de la recherche et e l'innovation notamment dans la robotique.
Ce modèle organisé, volontariste est caractérisé par la collaboration entre l'état et les grandes entreprises. On a largement affaire à un capitalisme encadré par l'état. Le mit (ministère du commerce international et de l'industrie) collecte ainsi des informations et propose des prospectives à long terme aux entrepreneurs japonais. L'état mène également d'important travaux d'aménagement du territoire (infrastructures du transport …).
- le modèle japonais repose par ailleurs sur une structure dualiste :
D'un côté les grands groupes industriels, les Keirestu (Mitshubishi, Toyota … ) s'appuient sur des sociétés de commerce qui les aident à commercialiser leurs produits : les Sogo Shosha sont le coeur de l'économie japonaise. De l'autre, un réseau fourni de PME assure la sous-traitance et joue un rôle d'amortisseur en cas de crise.
Le Japon a ainsi connu jusqu'aux années 90 une période de "haute croissance". Elle a fait de lui la 2ème puissance économique et financière mondiale. Il domine l'ensemble de la région sur le plan financier et technologique. Depuis 2010, la Chine l'a toutefois dépassé en terme de PNB.
b- Les quatre dragons, une diffusion du modèle japonais
Par ses investissements et son aide au développent, le Japon, mais aussi les USA ont favorisé la croissance et l'intégration progressive des "Nouveaux pays industrialisés".
La Corée du Sud, Taiwan, et dans une moindre mesure Hong-Kong et Singapour ont globalement adopté un modèle de développement à la japonaise : c'est-à-dire : intervention de l'état capitale, création de zones franches, planification indicative, aménagement des littoraux. En Corée du Sud on observe même une dualité complémentaire entre les grandes entreprises (chaebols : Hyundai, Samsung …) et les PME. Le développement industriel a lui aussi été stimulé par le "vol des oies sauvages". Il est basé sur les productions progressivement délaissées par le Japon. Aujourd'hui, les dragons possèdent des firmes dans les secteurs les plus modernes. Elles concurrencent celles du Japon, même dans le domaine hightech.
Les cités portuaires d'Hong Kong et de Singapour présentent toutefois quelques spécificités : elles sont pénalisées par la petitesse, l'exiguïté de l'espace et la faiblesse du marché intérieur. Elles sont donc par nature contraintes à une économie d'exportation. Elles ont également joué de leur statut de cité-état pour attirer les capitaux occidentaux et devenir des noeuds de communication majeurs. Singapour est ainsi devenue la première place financière de l'Asie du Sud Est et l'une des premières places du trafic maritime mondial (notamment dans les conteneurs).
c- La Chine littorale, une montée en puissance spectaculaire
Après l'arrivée au pouvoir des communistes en 1949, la Chine a adopté un modèle de développement de type soviétique. La rupture avec Moscou en 1960 l'a conduit à définir une "voie chinoise" caractérisée par l'otartie économique. Elle donne lieu au "grand bond en avant", puis à la révolution culturelle qui débouche sur des échecs dramatiques. A la fin des années 70, Deng Xiaoping, dirigeant communiste réformateur préconise l'ouverture progressive du pays, afin de rattraper son retard. Des zones économiques spécialisées (ZES) sont crées dans des régions lttorales du Sud et de l'Est. Elles proposent des conditions fiscales et une main d'oeuvre particulièrement avantageuse aux investissements étrangers. Par voie de conséquence les mécanismes de l'économie sont réintroduits et se diffusent à l'ensemble des pays. Ainsi, l'essentiel du secteur bancaire, du commerce, et une partie de l'industrie sont privatisés. Aussi la Chine devient-elle rapidement un immense atelier de fabrication. Elle présente en effet des avantages comparatifs sans équivalents. Elle entre à l'OMC en 2001 et elle est devenue le 1er pôle d'accueil d'IDE et depuis 2010, la 2ème puissance mondiale.
3- Un système d'échanges intra-régional vulnérable
a- Une intégration par les réseaux d'entreprise
Le modèle de développement en relais explique donc précisément l'unité de l'ensemble en apparence hétérogène que nous étudions ici. Il conduit en effet à la mise en place d'une division régionale du travail. Elle est organisée et dominée encore aujourd'hui par le Japon qui investit massivement dans les quatre Dragons et en Chine. A partir des années 90 toutefois, la montée en puissance des Dragons permet une redistribution des échanges commerciaux et des investissements. Ainsi, Taïwan et Hong-Kong procèdent à leur tour à des IDE massives vers la Chine et les NPIA 2 : Malaisie, Thaïlande, Indonésie, Philippines, et plus récemment le Vietnam.
La spécialisation et la complémentarité des chaînes de production des différents pays s'accroissent donc. Les centres de commandement et d'innovation restent souvent au Japon. Les unit"s de production se dirigent vers les régions aux coûts salariaux peu élevés. Des réseaux d'entreprise hiérarchisés et enchevêtrés apparaissent. Ils font de l'Asie Orientale un ensemble économique très cohérent. Ainsi, les constructeurs automobiles japonais et coréens fabriquent ensemble des véhicules qu'ils vendent sous le nom de la marque respective.
A cela s'ajoutent des réseaux informels comme la diaspora chinoise implantée en particulier dans les pays du Sud-Est asiatique (Vietnam, Malaisie, Indonésie) mais aussi au Canada et aux USA. Elle dispose d'un pouvoir financier considérable et d'un rôle majeur dans le négoce. Cette diaspora a un rôle majeur dans les investissements vers la Chine littorale par l'intermédiaire de Hong-Kong.
L'Asie Orientale connaît donc un processus d'intégration des flux financiers et commerciaux intra-régionaux (50% du total). Elle est après l'UE la zone économique où ils sont le plus intenses.
b- Déficit d'intégration institutionnelle et rivalités géopolitiques
La puissance de l'Asie Orientale est cependant lourdement handicapé par l'absences d'institutions économiques et politiques communes. L'ASEAN qui a développé un partenariat avec la Chine, le Japon, et la Corée du Sud ne parvient pas à devenir une vraie zone de libre échange. Quant à l'APEC, ce n'est qu'un forum de discussion.
Plus préoccupant encore, des tensions importants opposent les différents partenaires, notamment le Japon et la Chine pour le leadership régional. Le Japon continue à jouer un rôle économique majeur mais reste toutefois pénalisé par les mauvais souvenirs que ses agressions des années 30 et 40 ont laissé à ses voisins.
La Chine s'impose progressivement comme la future grande puissance économique mais aussi stratégique de l'Asie. Elle suscite n"anmoins les craintes de la Corée du Sud, du Japon et surtout de Taïwan. Ceux-ci cherchent tout naturellement la protection de Washington qui entretient une présence militaire importante. Les USA sont donc le troisième acteur majeur de la région. Les tensions, importantes, se cristallisent sur deux points chauds :
- Taïwan que la Chine considère comme une province rebelle
- la frontière entre la Corée du Sud et la Corée du Nord, régime communiste qui s'est récemment doté de l'arme nucléaire.
c- Les fragilités internes
L'Asie Orientale est par ailleurs confrontée à des formes variées de fragilisation :
- comme l'UE elle est confrontée à un vieillissement rapide de sa population. Cela résulte de l'allongement de l'espérance de vie mais surtout de la baisse de l'indice de fécondité lié parfois à une politique de restriction des naissances (RPC).
- les inégalités régionales continuent de se creuser : la concentration des fonctions de commandement et des activités liées à la mondialisation s'est faite au profit des métropoles littorales souvent au détriment des régions intérieures. Ainsi, plus que jamais, le Japon de l'endroit s'oppose au Japon de l'envers. En Chine, le littoral représente 14% de la superficie du pays mais concentre presque la moitié de la population et 80% des IDE et des exportations. La question de la cohésion du pays est posée du fait de la montée de forces centrifuges notamment dans les régions périphériques (Tibet, Xinjiang). Une population formée de masses paysannes venues de l'intérieur (Chine connaît le plus vaste exode rural de l'histoire constitue un facteur d'instabilité sociale).
l'Asie Orientale a par ailleurs été très touchées par la crise de l'automne 2008. Celle-ci a révélé l'ampleur de l'endettement de certains FTN et de certains états (Japon).
- enfin, il s'agit là d'un espace particulièrement vulnérable aux risques naturels, comme l'illustrent le tremblement de terre et le tsunami qui a touché le Nord-Est d'Honshu en mars 2011. Tout cela débouche sur des risques liés aux activités humaines comme la pollution et plus grave encore les risques nucléaires (centrale de Fukushima).
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