mercredi 11 mai 2011

La religion - P.

Interprétation et signification : LA RELIGION

                                  
 Problèmatisation :
Croire se prend en deux sens :
a-    faible : « je crois qu’il pourrait bien venir demain » = probabilité limitée voire basse.
b-    Fort : un croyant fervent dit « je crois en dieu » = je sais qu’il existe.
La foi est l’autre nom de la croyance religieuse, c’est-à-dire une conviction qui peut religere = relier (les hommes entre eux, et à Dieu).
            NB : cette étymologie est rejetée au 20ème siècle au profit de relegere (qui s’oppose à neglegere). La religion respecterait.
Or, en principe, le lien véritable, c’est l’universel, c’est-à-dire la raison.
Peut-on concevoir un lien universel autre que la raison ?

            1- Le « sentiment religieux » (PASCAL)

La foi serait plus forte que la raison, un mode de connaissance supérieur.
           
            Pensée 268 : un impératif : l’ordre, c’est-à-dire chacun et chaque chose à sa place.
Trois positions :
            a- le Pyrrhonisme = le scepticisme = le doute systématique
            b- la géométrie : c’est-à-dire le domaine des certitudes et du démontrable
            c- le christianisme c’est-à-dire la religion qui reconnaît une révélation (l’homme dieu).

            L’ordre est évident :
Le a) impose une limitation au b) car il brise le dogmatisme d’une certaine raison et ainsi se prépare la soumission du chrétien.

            Pensée 272 : un projet : conduire la raison et faire son propre examen critique. Milieu 17ème, le courant rationaliste est fort, il entend tout réduire à la connaissance rationnelle et il culmine dans le courant libertin c’est-à-dire tous ceux que les catholiques nomment « esprits forts » avec ironie. Pascal veut briser les prétentions des libertins = conduire la raison à se désavouer. La raison recherche la vérité, or la vérité est que la raison est limitée. Donc la raison ne peut que reconnaître sa propre limitation.
            Pensée 277 : le cœur, c’est-à-dire le siège de l’affectivité (les sentiments, les préférences intimes, et à la limite, l’irrationnel). Le cœur a les moyens de circonvenir la raison c’est-à-dire la faculté de rester lucide et raisonnable (sens 2) et pour cela, il utilise des arguments, des « raisons » et même des arguties.
            Pensée 278 : l’objet suprême auquel s’applique le cœur, c’est Dieu, il connaît son existence et peut être certaines de ses propriétés. On ne peut pas démontrer l’existence e Dieu (la raison n’a rien à y faire). Pourquoi ? C’est le cœur qui détient la connaissance immédiate = sans médiation (par intuition).
D’où : l’originalité du dieu chrétien : il repose sur l’idée d’un homme-dieu + résurrection et … Il n’y a pas à démontrer, il y a à sentir.   
            Pensée 282 : la raison comparée au cœur. La connaissance humaine repose sur les « premiers principes ». Ils sont indémontrables, c’est-à-dire hors de portée pour nos démonstrations. Mais nous n’en doutons pas. D’une part, les axiomes (jugés évidents pour tous), d’autre pas, les postulats (pour lesquels on demande l’accord d’autrui). Les sceptiques croient pouvoir utiliser la raison pour ruiner ses principes, mais cela reste vain et sans résultat.
            Exemple : nous connaissons l’existence du monde extérieur, ce n’est pas un rêve. La raison ne peut pas le prouver. Il faut en conclure que notre connaissance est ferme grâce au cœur (et non à la raison).
            Nous savons qu’il y a un espace, un temps, du mouvement, des nombres etc … Cette certitude n’a rien à envier à celle de nos raisonnements. Elle relève du cœur = un « instinct » qui nous évite la démonstration, la connaissance par médiation, le mode discursif. La raison déploie un discours (par étapes) et elles se fondent sur le cœur.
            L27 : la péroraison : renversement du lieu commun rationaliste. On ne regrettera plus une insuffisance des connaissances par la raison (=leur trop petit nombre). On se demandera plutôt pourquoi l’esprit humain ne connaît pas davantage par le cœur = immédiatement, car ce serait une aubaine, l’idéal.
Réponse : la nature « nous a refusé ce bien » c’est-à-dire le péché originel nous prive la facilité et nous impose le travail (le raisonnement, le « travail intellectuel ).

            Pensée 793 : (schéma)

            Représentation symbolique de la condition humaine par 3 ordres :
a- Les corps c’est-à-dire les grandeurs matérielles : « les rois, les riches, les capitaines, et tous les gens de chair ».
b- les esprits c’est-à-dire la connaissance et même la science. Voir Archimède.  
c-    la charité c’est-à-dire JC qui introduit à la sainteté.
Charité = un don sans réciprocité.
            Leur relation : entre a et b « distance infinie » c’est-à-dire une différence de nature et non de degré = un abîme infranchissable.
Voir l49 à 51. Tout corps est une chose étendue, c’est-à-dire incapable de connaissance. Mais un esprit, même le « moindre » se représente l’univers, le ciel étoilé et même sa propre existence.
            La seconde distance « infiniment plus infinie » représente la transcendance, c’est-à-dire une différence de nature véritablement extrême (à peine pensable).
Voir fin du texte : un esprit n’est pas un corps amélioré, supérieur. Mais la charité est encore moins une forme supérieure de l’esprit. C’est « un autre ordre ». Difficulté :  si la grâce ne nous est pas donnée, c’est-à-dire la connaissance de Dieu, nous ne pouvons pas y accéder.
            Réponse de Pascal : le libertin a intérêt à miser sur la vie éternelle. Il évitera l’angoisse et le sentiment du non-sens. On ne démontrera pas que Dieu existe, mais on établira que vivre dans cette idée constitue un meilleur mode de vie.

            Pensée 233 : les procédés qui font entrer dans la foi, c’est-à-dire dans le personnage du croyant. :
            1- prendre acte de ce qu’est la raison (impuissante à démonter l’existence de Dieu). Donc, ne rien attendre d’elle.
            2- Travailler sur l ‘autre terrain = réduire les passions. Le but est de traiter « l’infidélité » comme une maladie = une affection, une pathologie curable.
            L’INFIDÉLITÉ : l’ingratitude de la créature face au créateur.
            3- Se faire tout petit, se confier aux dehors de la foi par le biais des rites de l’Eglise (eau bénite …)
            4- « cela vous abêtira » c’est-à-dire le libertin c’est « l’esprit fort » il ne se laissera pas soumettre. Il refuse les dogmes, il lui faut renoncer à un certain esprit, c’est-à-dire à une dose d’esprit (= de distance) pour acquérir un peu d’âme (c’est-à-dire d’adhésion et de générosité). Pourquoi ? L’âme nous rapproche de la charité.
            NB : un grand esprit sera souvent caustique. L’âme est capable de donner, elle est « simple ». 
            NB : Pascal ne dit pas que la foi rend stupide, mais qu’elle brise les prétentions du bel esprit.
            5- Les passions sont les ennemis de la foi = tout le péché d’orgueil.

            Critique : Voir St Augustin : « Je crois pour comprendre ».
C’est-à-dire la foi inverse le cheminement de la science. Le savant commence par expliquer une idée, après quoi, il y croit. La foi commence à se soumettre (à une révélation, à des textes, des témoignages …) après quoi c’est adhésion fait naître une lumière. L’inintelligible devient intelligible.
            « Je crois parce que c’est absurde ». Tertullien.
En principe, le non-sens fait fuir toute faculté d’adhésion, par exemple cercle carré. Mais dans la foi, la contradiction devient un paradoxe, c’est-à-dire une stimulation qui va contre l’opinion la plus répandue et contre la paresse de nos facultés.
            Par exemple : pour un chrétien : le mystère de l’Incarnation = Dieu s’est fait chair = l’homme dieu = l’infini est devenu fini.
L’absurdité est l’aliment de la foi.
            « La philosophie, c’est la médiation, alors que le christianisme c’est le paradoxe ». Kierk Egaard. D’un côté, la raison qui parvient toujours à expliquer, et qui résout les contradictions (la médiation). De l’autre, la contradiction qui rete entière et ouverte comme une plaie : il s’agit de ne rien résoudre.

            Problème considérable : la foi et la philosophie ne pourraient plus dialoguer. Avec tout ce qui en résulte, c’est-à-dire le risque de l’obscurantisme, c’est-à-dire on comprend mieux dans les fumées de la superstition, mais aussi de l’irrationalisme (= il faut cultiver les ennemis de la raison contre la raison).

            2- Sentiment ou ressentiment ? (NIETZSCHE)

            « L’homme serait comme un lac qui s’écoule en Dieu ». Feuerbach. La religion serait donc une déviation du sacré. L’homme percevrait sa propre infinité, mais il l’aliénerait au profit de Dieu.
            « La conscience de l’infini n’est en fait que l’infini de la conscience. » Feuerbach.
Attitude qui illustre l’humanisme athée. L’homme a une tâche prioritaire : se réapproprier son essence = se réconcilier avec lui-même = se redécouvrir.

            Voir Nietzsche – 1872 – La naissance la tragédie

Une généalogie de l’Occident. Quels sont ses parents ? A-t-il une origine noble ou basse ? Traduit-il la recherche d’un mode de vie élevé, estimable, admirable ou méprisable ?
            Conclusion : Nietzsche n’expose pas une genèse de l’Occident, c’est-à-dire comment il s’est fait. Il faut monter ce qu’il vaut = les valeurs qui s’expriment dans sa culture.
            Les européens se croient héritiers des grecs anciens = le « miracle grec » c’est-à-dire le VIème, Vème, IVème siècle avant notre ère. En fait,  nous avons trahi cette inspiration. Au 5ème avant JC culmine la période tragique. La tragédie ne se réduit pas à un genre théâtral. C’est surtout un mode de vie. Les grecs étaient les plus forts grâce à leur extrême vitalité. Ils aimaient la vie, même dans les pires épreuves.
Voir le jeu ou plutôt la tension entre deux cultes.

            Dionysos : la démesure, l’ivresse, la disparition de toute individualité, et une sorte de communion sauvage avec la nature dans un sentiment tragique = l’homme n’est pas fait pour ce monde et réciproquement. Le fond de l’existence, c’est la cruauté.
Le supplice de Dionysos : les Ménades qui font renaître la nature.
            Apollon : la mesure, la maîtrise de soi, la lumière, le rêve, la beauté statuaire, et l’apparence sélectionnée et cultivée pour son effet de belle surface.
            Conclusion : Dionysos voit dans son supplice une affirmation de la beauté de la vie.

            Le tragique décline et apparaît alors le ressentiment = le contraire de la vitalité. Le ressentiment dicte une volonté de se venger de la vie.
Voir fin 5ème siècle : l’apparition de Socrate tue le tragique. Pour lui, l’univers est un cosmos, c’est-à-dire un « bel endroit ». D’où l’idée d’une providence qui ordonne toute chose pour le meilleur = optimisme. La vérité serait ailleurs, c’est-à-dire non pas dans l’existence terrestre mais dans un arrière monde. Pourquoi ? Le corps, la chair, nos cinq sens sont trompeurs et coupables. Il faut les rejeter. Pour cela on développera l’ascèse, c’est-à-dire la destruction des désirs et des plaisirs + la modification du corps. D’où une purification, c’est-à-dire l’homme devient pur esprit. Il ne désire plus, il devient contemplatif = théorique. La vérité, la science, la vraie beauté, sont dans un au-delà. La vie nous en tient éloigné. C’est une maladie, dont la mort nous guérit.
            Voir les derniers mots de Socrate : « Nous devons un coq à Esculape » (dieu de la santé). Le ressentiment est la dépréciation de la vie. C’est un signe d’asthénie = affaiblissement des forces vitales.

            Le christianisme. Il orchestre la décadence, le déclin. Il introduit un médiateur entre l’homme et Dieu : celui qui meurt « pour le rachat de nos péchés ». D’où un second supplice : la croix qui sacrifie l’innocent. Le Christ prouve par son exemple que la vie est impure, c’est-à-dire qu’elle est déjà la pire des souffrances. Il faut la dépasser, vers une vraie vie (en esprit). Le Christ est la condamnation de cette vie par opposition à Dionysos, c’est-à-dire l’éternel retour.
            Pendant le Moyen-Âge, il constitue l’Europe, puis au 16ème, la Renaissance : « La mort de Dieu », c’est-à-dire la foi romaine (catholique) subit un assaut redoutable. D’une part, la Réforme, c’est-à-dire Luther (intériorisation du culte). D’autre part, Copernic et bientôt Galilée c’est-à-dire la naissance d’une nouvelle vision de l’homme.
            17ème : de Galilée à Newtown, formation de la science moderne (mathématisée).
            18ème : les Lumières, c’est-à-dire la lutte contre l’irrationalisme (la superstition, l’intolérance etc …) + l’apparition d’une foi nouvelle : le progrès.
            19ème : Révolution industrielle + formation de la conscience historique.
            Milieu 19ème : la crise, c’est-à-dire le nihilisme, c’est-à-dire les anciennes valeurs ne sont plus rien : elles se dévalorisent. D’où un vide angoissant.
Autodépassement de la morale : le christianisme a commandé la sincérité, la véracité = le mensonge est le péché suprême. Or, on peut se mentir à soi-même c’est un cas parmi d’autres).
            Conclusion de Nietzsche : il ne faut mentir à personne (discours chrétien), pas plus à soi-même qu’à autrui.
Le dieu chrétien a fait croire à des fictions. Par exemple une providence, un arrière monde. Mais l’Europe n’y croit plus.
Conclusion : le christianisme s’est dépassé lui-même par moralité (ne vous mentez pas).
            Fin 19ème : on veut combler un ciel vide de valeurs, et à cette fin on défie la vérité scientifique, le progrès etc …
            ATTENTION ! : c’est le pire des dangers.
Une nouvelle version du ressentiment : la vérité se trouve dans le monde du savant (elle est encore détachée du corps, de nos sens et de la terre).
            « Nous aussi nous sommes encore pieux ». Nietzsche. C’est-à-dire croire à la science, c’est croire au Dieu-vérité.
           
            Critique : Le nihilisme est une crise qui dénoue la décadence c’est-à-dire qui met à nu le ressentiment. L’humanité a besoin de nouvelles valeurs. Lesquelles ?
            Voir Ainsi parlait Zarathoustra :
« Je vous enseigne le surhomme (…) l’homme est un animal qu’il faut dépasser (…) c’est une corde tendue entre la bête et le surhomme (…) au dessus d’un abîme ». Zarathoustra.
            Explication : l’homme est une espèce transitoire. Trois possibilités :
a- La régression vers la bête, c’est-à-dire la brutalité.
b- Le surhomme c’est-à-dire celui qui rend compatibles les aptitudes inconciliables jusqu’alors.
            Par exemple : un home de la renaissance.
c- L’abîme, la chute dans la médiocrité, l’inexistence, l’insignifiance, l’obsession du bonheur à tout prix (petit et facile).
Donc le rejet de l’exceptionnel (le génie, le héros etc …).
Nietzsche entrevoit une humanité rabougrie et limitée à des petits plaisirs, aucun avenir, aucune créativité. Une seule issue : le surhomme, le dépassement, mais comment ? Une formule : « Un césar romain qui aurait l’âme du Christ ».
            Abolir la séparation du politique et du religieux, prononcée dans l’évangile selon Saint Mathieu.
            Nietzsche veut un chef de guerre qui puisse dominer, il est dans d’autres textes très explicite sur ses propres fascinations. Voir généalogie de la morale.
           
            (à propos des peuples scandinaves) : « Au fond de toutes ces races aristocratiques, on sent le fauve, la superbe brute blonde en quête de proie et de carnage ». Nietzsche.
Une fascination pour la violence, pour la nature brute et l’amoral. Or, cette nature est en deçà du bien et du mal. Or, le surhomme se veut « au-delà » du bien et du mal, c’est-à-dire il dit avoir dépassé le dualisme moral. Le surhumain ne risque-t-il pas l’inhumain ?

            3- Le respect, sentiment pré religieux (Kant)

            Dégager, mettre au jour l’idée pure de religion, c’est-à-dire ce qui peut réconcilier la religion avec sa propre critique.
            KANT

            On distinguera la religion (unique) et les croyances (multiples). La religion, c’est l’universel, il est présent dans le cœur de chaque homme et il n’a rien à voir avec les croyances = les religions révélées qui font chacune une Eglise. Et qui cessent parfois de se tolérer les unes les autres (d’où les guerres de « religion »). Mais ce sont en fait des croyances qui s’affrontent. La croyance suppose une conviction qui identifie un groupe par le biais d’une révélation (des textes, des traditions orales, des rites, des pratiques qui rapportent des « faits »).
            Par exemple : les miracles ou des actes exemplaires.
            La prédication utilise le mot religion de façon imprudente. Trop souvent, les prêtres font croire à un public grossier que leur confession est la « religion » c’est-à-dire l’élément universel qui peut prétendre réconcilier (autour de la vérité). Le mot religion exige des précautions. Il laisse entendre un lien universel (incompatible avec les particularismes des cultes). Religion dit quelque chose d’impalpable, d’insensible, d’inaccessible pour nos 5 sens. Or, toute église utilise des rites, des pratiques empiriques. La religion se dérobe à cette emprise, elle se réfugie dans le forum intérieur. Elle suscite une réelle pudeur. Et surtout, il est quasi impossible pour l’homme de l’observer. Autrui ne sait pas ce que je pense et moi-même je peux m’abuser. « Dieu seul peut sonder les reins et les cœurs ». La religion suppose la pureté de l’intention, c’est-à-dire le désintéressement, l’absence d’égoïsme. Chacun s’en vante, mais qui en est vraiment capable ?



   Il est rare qu’on puisse dire « un tel professe telle confession ». Le plus souvent, un fidèle prétend à l’universalité sans pouvoir dépasser certaines limites étroites, celles d’un culte limité. « La foi d’Eglise statutaire » c’est-à-dire les rites et les règles d’institution. Donc, tout ce qui particularise le culte en le refermant (risque d’intolérance, de fanatisme …)
            Conclusion : Il n’existe pas de « guerre de religion ». Mais parfois, les croyances s’affrontent, l’un exclut l’autre ou les autres, c’est-à-dire une croyance et établie refuse aux autres la liberté de culte. Impossible de forcer un individu à croire ou ne pas croire. La conviction repose sur l’obligation (intérieure) et non sur la contraire (extérieur).
            Le centre du texte : la religion (vraie) dépend des intentions morales. Ce n’est pas une affaire de révélation, c’est une question de moralité = forum intérieur, « conscience ». La religion ne trouve pas sa vérité dans la connaissance (au sens habituel), mais bien dans l’action. « La religion est la connaissance de tous nos devoirs comme commandements divins ». Kant.
Voir le « comme » : il s’agit d’une sorte d’équivalence = un comme si.
Voir la référence Pater Nostre : « Que ta volonté soit faite ».
            Avant Kant, on part de la religion et on en tire une morale c’est-à-dire on part d’une révélation, et on en déduit un mode de vie. Avec (à partir de) Kant, c’est-à-dire les Lumières, on part de la moralité et on va vers la religion. On voit dans la moralité l’esquisse d’une religion possible. La connaissance des devoirs doit connaître à un lien universel vu comme une espérance.
            Voir les grandes questions qui font la philosophie :
            1- Que puis-je savoir ? : problème de la connaissance
            2- Que dois-je faire ? : problème de la moralité
            3- Que m’est-il permis d’espérer ? : problème de la religion.

= Qu’est-ce que l’homme ?

            Le religion est comme un chemin qui conduit du 2 au 3. L’homme rencontre l’absolu non pas dan la connaissance, mais dans l’action (libre).

            a- L’idée du rationalisme critique : c’est-à-dire le procès de l’irrationalisme : Kant dénonce la haine de la raison, la misologie. Et surtout l’illuminisme. Voir Swedenborg : le mysticisme, c’est-à-dire le privilège de l’illuminé (celui qui a reçu la lumière), la possibilité de dialoguer avec Dieu. Plus généralement, exaltation de l’esprit. L’homme pourrait sortir des limites de son expérience et entre dans l’absolu et c grâce aux sentiments. D’où une extension de l’irrationnel, la négation de toute légalité naturelle. Voir la possibilité du miracle à tout moment. Bref, le développement de la superstition, la ruine de toute rationalité et surtout de l’entendement, c’est-à-dire la faculté humble qui veut déchiffrer les phénomènes c’est-à-dire relier des effets à des causes. D’où la porte ouverte à l’obscurantisme, au fanatisme etc … Il faut « s’orienter » dans la pensée » c’est-à-dire reconnaître une seule foi = croire en la raison.

            b- Procès de la métaphysique dogmatique. A côté du sentiment, il y a une dérive l’esprit humain qui se révèle plus sournoise. Nous prétendons connaître l’absolu par la raison, c’est-à-dire des concepts. L’entendement s’applique aux phénomènes = ce qui apparaît. La raison dépasse ce domaine, cette sphère. Elle veut s’élever à l’absolu, par exemple l’âme ou l’univers. La raison ne s’appuie pas sur l’expérience. D’où son problème en métaphysique. Elle croit que la vérité repose sur la cohérence = l’accord de la pensée avec elle-même = la non-contradiction. La raison dit : quand une idée est non-contradictoire, elle est vraie. En théologie, une vision cohérente de l’être suprême suffirait à en démontrer l’existence. D’où trois preuves privilégiées (de la théologie rationnelle).

            1- Preuve ontologique (St Anselme)
            2- Preuve cosmologique
            3- Preuve physico théologique (= téléologique)

            1- Preuve ontologique
J’ai l’idée d’un être qui a toutes les perfections.
Or, l’existence est une perfection.
Donc cet être existe.
            Cette prétendue preuve est un sophisme. Pourquoi ? Il repose sur le verbe être, mais il en prend les deux sens et il glisse de l’un à l’autre.
Voir 1ère proposition : être épris au sens « essentiel », au sens prédicatif, c’est-à-dire on établit des propriétés, des qualités qu’on attribue à un sujet.
            2ème proposition : on glisse sans le dire au deuxième sens qui est existentiel.
Exemple : « être ou ne pas être » ou encore « je pense, donc je suis ».
            Conclusion : on prétend tirer une expérience de l’essence. Or, c’est impossible. Pourquoi ? L’existence n’est pas l’objet d’un calcul, d’un raisonnement. On peut la constater, l’observer, la vérifier expérimentalement, mais on ne peut pas la déduire (à partir d’un concept). D’om la nécessité de séparer deux ordres : d’une part, ce qui est logique, d’autre pas, l’existence elle-même.
            NB : cette page de Kant a fondé le courant existentialiste qui culmine avec Sartre. L’existence est un fait brut et contingent (rien à voir avec une nécessité logique, un raisonnement comme 2+2=4). Pourquoi ? il faut distinguer l’ordre des essences (idées + concepts), les objets de pensée. Exemple : 2+2=’ et d’autre part les existence qui sont constatées, rencontrées, et pour l’home objet d’un vécu (+ d’une souffrance).

            La non-contradiction d’un concept ne suffit pas à affirmer une existence. Pour cela, il faut une rencontre. En métaphysique, on en déduire que les idées sont des problèmes. Chacune nous dit : peut-être.
« La colombe légère qui fend l’air de son vol, s’imagine qu’elle volerait beaucoup mieux dans le vide ». Kant.
            La raison croit que l’expérience est une contrainte, une gêne. Mais en fait, elle est l’appui qui manque cruellement. Pourquoi ? Il n’y a pas d’expérience métaphysique, c’est-à-dire purement rationnelle. L’homme n’a qu’une expérience empirique. D’où la distinction entre connaître et penser.
On connaît quand on s’appuie sur la connaissance sensible. Par exemple : la science.
On pense quand on dépasse la connaissance sensible. Voir la métaphysique.
            « Entre 100 thalers possibles et 100 thalers réels, il n’y a aucune différence sur le plan du concept, mais il y en a une pour quiconque a besoin de cette somme et ignore s’il pourra se la procurer ». Kant.
            Application à l’idée de Dieu : cette idée est possible c’est-à-dire non-contradictoire = dieu est pensable, mais nul ne l’a rencontré, c’est-à-dire on ne peut pas prouver son existence (par un moyen expérimental c’est-à-dire empirique). De même, je peux leur présenter un être mythologique comme une lionne c’est-à-dire l’idée n’est pas un cercle carré. Mais je n’ai pas le droit de dire qu’il existe une licorne.

            2- Preuve cosmologique
L’état présent de l’univers est contingent c’est-à-dire il n’a pas en lui-même sa raison d’être.
Or, de cause en cause, il faut remonter à une cause première (= qui contient sa propre raison d’être).
Donc Dieu (= cause première) existe).
            Critique de Kant : cette preuve par l’univers (cosmos) utilise sans le dire la première preuve c’est-à-dire elle glisse de l’idée de cause nécessaire à l’idée de Dieu = être parfait = c’est un sophisme.

La cause première nécessaire pourrait être la matière. Pourquoi l’appeler Dieu ? Cette substitution était présente dans la preuve ontologique.

            3- Preuve téléologique : telos : finalité, intention

Kant dit : c’est la preuve qui par le plus, et ce à tout le monde. Nous observons un ordre de l’univers (régularité, lois physiques inviolables, et harmonie des formations biologiques      c’est-à-dire adaptation du vivant, de ses organes …)
            Exemple : l’œil est fait pour voir.
L’univers résulte d’un dessein.
Or, ce dessein est un antihasard qui ne s’explique pas par son contraire, c’est-à-dire le hasard (l’absence d’intentions).
Donc cet ordre suppose un ordonnateur = Dieu.                      
            Critique de Kant : on prouve tout au plus l’existence d’un horloger, d’un architecte ; mais cet ordonnateur n’est pas pour autant un créateur. Cette troisième preuve partage le défaut de la deuxième, c’est-à-dire elle traite l’idée de créateur comme celle d’un être parfait. Et du coup, nous retrouvons la faille de la première preuve, c’est-à-dire on prend une existence nécessaire, et on la nomme Dieu, être parfait.
            Conclusion : Il n’y a pas de vraie preuve spéculative, c’est-à-dire théorique de l’existence de Dieu.
           
            c- Le respect (de la moralité à la religion)

L’absolu est accessible non pas par la connaissance, mais par l’action c’est-à-dire l’homme fait usage de sa liberté. D’où la relation étroite en moralité et religion. La loi morale nous montre ce qu’est le respect, c’est-à-dire le sentiment religieux, celui qui nous fait entrer dans l’espérance. Soit la question « que dois-je faire ? ». Une seule réponse : seule la raison nous le dit (et non les impulsions de notre sensibilité). Le devoir suppose une dimension universelle. « Je dois » = tout le monde doit. Voir l’impératif catégorique.
            « Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée en loi universelle ». C’est-à-dire, avant d’agir demande toi ce qui se produirait si tous faisaient la même chose. Est-ce conforme aux exigences de la raison ?
            exemple : le mensonge n’est pas universalisable sans contradiction. Il ne peut pas être commandé : se prêter à un commandement moral. Conclusion : ce qui compte ici, c’est la cohérence = la non-contradiction. D’où 3 formules dérivées :
            1- cette universalité doit avoir une nécessité parfaite qui évoque l’inviolabilité des lois physiques.
            2- cette même nécessité et cette universalité se traduisent par le respect c’est-à-dire une égalité de statut.
            « Traite l’humanité, dans ta personne comme dans celle d’autrui, toujours en même temps comme un fin et jamais simplement comme un moyen ».
Si nous utilisons les services d’autrui, nous devons lui rendre un équivalent du service reçu, c’est-à-dire ne pas traiter autrui comme une chose, une machine, un esclave. Il faut savoir le servir en retour, c’est-à-dire ne pas le réduire à un moyen, mais le traiter comme une fin.
            Autrui c’est aussi moi-même, c’est-à-dire celui sur lequel je peux agir. D’où un sentiment spécifique = irréductible = qui ne ressemble à aucun autre. Le respect, c’est-à-dire la connaissance d’une liberté. Le respect s’adresse à la loi morale, par exemple admirer un héros. Ce n’est pas idolâtrer un individu (trop particulier et trop « humain »). C’est plutôt reconnaître le principe de l’acte = la pureté de l’intention qui ne sert pas un intérêt égoïste. Le respect peut nous relier. L’obligation (morale) nous prépare au lien religieux.

            3- l’autonomie c’est-à-dire le sujet libre se donne sa propre loi, il ne la reçoit pas (de l’extérieur et par contrainte, par exemple comme pour la loi juridique).  Cette loi vient de la raison elle-même, c’est-à-dire de l’intérieur et ainsi se constitue un règne proprement humain au dessus du règne simplement naturel. Avec la liberté apparaît aussi une autre légalité que celle des lois physiques. L’homme est cet animal qui peut ne pas, c’est-à-dire il se détermine autrement que par instinct = il peut agir par autonomie.
            Problème : cette liberté met en jeu deux définitions :
            a- Négative : c’est le libre-arbitre (pouvoir ne pas)
            b- Positive : pouvoir se déterminer par soi-même, c’est-à-dire par raison.
Le a- contient la possibilité du mal = faire  une exception à la loi. Et cela en sa propre faveur, c’est-à-dire par égoïsme. La religion est une espérance (et non une connaissance ou une morale). Elle offre une solution aux problèmes du mal. L’homme est faillible = exposé à la tentation. La religion prend dans la moralité l’idée de pureté (de l’intention) c’est-à-dire le désintéressement. 
         

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